Alfred de MUSSET (1810 - 1857)
Tóc nâu 26.01.2011 22:24:59 (permalink)



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Alfred  de Musset


Louis Charles Alfred de Musset est
un poète, auteur dramatique et romancier français né le 11 décembre 1810 et mort le 2 mai 1857 à Paris.

Alfred de Musset appartient à une famille aisée qui cultive le goût des lettres et des arts. Son grand-père était poète, et son père était un spécialiste de Rousseau, dont il édita les œuvres.

Il entre au collège Henri-IV à 18 ans et y obtient en 1827 le Prix de dissertation latine au Concours général. Grâce à Paul Fouché, il sympathise avec Sainte-Beuve et Vigny, mais se refuse à aduler le maître Victor Hugo. Après s'être essayé à la médecine, au droit, au dessin, à l'anglais, au piano et au saxophone, il prend le parti d'exploiter sa grande aisance d'écriture. À 20 ans, sa notoriété littéraire naissante s'accompagne déjà d'une réputation sulfureuse due à son dandysme et à sa fréquentation assidue de la débauche des demi-mondaines parisiennes.

Ebranlé par l'échec de sa première pièce, "Nuit Vénitienne", il publie néanmoins en 1832 "Spectacle dans un fauteuil", qui se compose d'un drame, "La Coupe et les Lèvres", d'une comédie, "À quoi rêvent les jeunes filles ?" et d'un conte oriental, "Namouna". Musset y exprime déjà la douloureuse tension entre débauche et pureté qui domine son œuvre.

Il part en Italie, en compagnie de George Sand. Voyage qui lui inspire "Lorenzaccio", drame romantique qu'il écrit en 1834, et "Contes d'Espagne et d'Italie". Mais il tombe malade et George Sand le délaisse pour son médecin.

Il rentre à Paris, où il fait jouer des comédies  telles que "Le Chandelier" ou "On ne badine pas avec l'Amour". Il écrit également des nouvelles en prose et la "Confession d'un enfant du siècle", consacrée à ses souffrances et déboires sentimentaux avec George Sand.

De 1835 à 1837, Musset compose son chef d'œuvre lyrique, "Les Nuits". Ces poèmes sont les Nuits de mai, de juillet, d'octobre, de décembre, autour des thèmes imbriqués de la douleur, de l'amour et de l'inspiration. Ces poésies, très sentimentales, sont aujourd'hui considérées comme l'une des œuvres les plus représentatives du romantisme français.

Bibliothécaire du ministère de l'Intérieur sous la Monarchie de Juillet, il est révoqué en 1848, puis devient bibliothécaire du ministère de l'Instruction publique sous le Second Empire. Il reçoit la Légion d'honneur le 24 avril 1845, en même temps que Balzac, et est élu à l'Académie française en 1852. De santé fragile (malformation cardiaque), mais surtout en proie à l'alcoolisme, à l'oisiveté et à la débauche il meurt le 2 mai 1857, quelque peu oublié.
- source -







Quelques citations :


La vie est un sommeil, l'amour en est le rêve


Et vous aurez vécu si vous avez aimé.  (A quoi rêvent les jeunes filles)


Après avoir souffert, il faut souffrir encore
Il faut aimer sans cesse, après avoir aimé.
  (La Nuit d'Août)




Celui qui sait aimer peut seul savoir combien on l'aime.


On peut aimer sans souffrir lorsque l'on aime sans rougir.


On dit qu'il n'y a rien d'aussi rapide qu'un sentiment d'antipathie.


Partons, dans un baiser, pour un monde inconnu.  (La Nuit de Mai)


Il est doux de pleurer, il est doux de sourire au souvenir des maux qu'on pourrait oublier.  (La Nuit d'Octobre)


L'homme est un apprenti, la douleur est son maître
Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert.
  (La Nuit d'Octobre)


Je puis délibérer et choisir, mais non revenir sur mes pas quand j'ai choisi.  (Lorenzaccio)



Ton âme t'inquiète, et tu crois qu'elle pleure : Ton âme est éternelle et tes pleurs vont tarir.



Rien ne nous rend si grand qu'une grande douleur.  (La Nuit de Mai)



Les larmes du passé fécondent l'avenir.  (Sur la naissance du Comte de Paris)


Je parle beaucoup au hasard : c'est mon plus cher confident.  (Fantasio)


Il y a des femmes que leur bon naturel et la sincérité de leur coeur empêchent d'avoir plus de deux amants à la fois.  (La Confession d'un enfant du siècle)


Malheur à celui qui, au milieu de la jeunesse, s'abandonne à un amour sans espoir.  (Les Caprices de Marianne)


Blessures du coeur, votre trace est amère ! Promptes à vous ouvrir, lentes à vous fermer.  (Le Saule)


La moitié d'un violent amour, c'est presque de l'amitié.  (Les Marrons du feu)


Ne pouvant se corriger de sa folie, il tentait de lui donner  l'apparence de la raison.  (Les Deux Maîtresses)


Dans un coeur troublé par le souvenir, il n'y a pas de place pour l'espérance.


Une femme pardonne tout, excepté qu'on ne veuille pas d'elle.


Une femme est comme votre ombre, courez après, elle vous fuit ; fuyez-la, elle vous court après.


Les grands artistes n'ont pas de patrie.  (Lorenzaccio)


Rien n'est vrai que le beau, rien n'est vrai sans beauté.  (Après une lecture)


Vous êtes comme les roses du Bengale, Marianne, sans épines et sans parfum.  (Les Caprices de Marianne)


Tous les hommes ne sont pas capables de grandes choses, mais tous sont sensibles aux grandes choses.  (Lorenzaccio)


Je ne crois pas, ô Christ, en ta parole sainte :
Je suis venu trop tard dans un siècle trop vieux.
D'un siècle sans espoir naît un siècle sans crainte.
  (Rolla)


Mais je hais les cafards et la race hypocrite
Des tartuffes de moeurs, comédiens insolents,
Qui mettent leurs vertus en mettant leurs gants blancs.
  (La Coupe et les lèvres)


Si je vous disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
  (A Ninon)


Les plus désespérés sont les chants les plus beaux
Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots.
  (La Nuit de Mai)


Un jeune curé fait les meilleurs sermons.  (Un Caprice)


Le plaisir des disputes, c'est de faire la paix.  (On ne badine pas avec l'amour)


Aimer est le grand point, qu'importe la maîtresse ?
Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse ?
  (La Coupe et les lèvres)


Il faut être ignorant comme un maître d'école
Pour se flatter de dire une seule parole
Que personne ici-bas n'ait pu dire avant vous.
  (Namouna)


Tout ce qui était n'est plus ; tout ce qui sera n'est pas encore. Ne cherchez pas ailleurs le secret de nos maux.  (La Confession d'un enfant du siècle)


Qu'est-ce donc qu'oublier si ce n'est pas mourir ?  (Lettre à Lamartine)


A défaut du pardon, laisse venir l'oubli.  (La Nuit d'Octobre)


Où le père a passé, passera bien l'enfant.  (Le Rhin allemand, réponse à la chanson de N. Becker)


Et ne vois-tu pas que changer sans cesse
Nous rend doux et chers les plaisirs passés ?
  (Chanson)


Le seul bien qui me reste au monde
Est d'avoir quelquefois pleuré.
  (Tristesse)


L'amour vit d'inanition et meurt de nourriture.


La plus belle fille ne donne que ce qu'elle a et l'ami le plus dévoué se tait sur ce qu'il ignore.  (Carmosine)


On peut bien être ridicule quand on aime, mais on ne l'est pas quand on souffre.  (L'âne et le ruisseau)


Quelquefois, il y a des sympathies si réelles que, se rencontrant pour la première fois, on semble se retrouver.


Avec de la mémoire, on se tire de tout.  (Namouna)


La bouche garde le silence
Pour écouter le coeur
  (La Nuit de Mai)


Une femme, c'est une partie de plaisir ! Ne pourrait-on pas dire, quand on en rencontre une : voilà une belle nuit qui passe ?  (Les Caprices de Marianne)


On naît poète, on devient prosateur.  (Le poète déchu)

Le retour fait aimer l'adieu.


Le bien perdu rend l'homme avare.  (Poésies nouvelles)


Tout réel n'est pour moi qu'une fiction.  (A quoi rêvent les jeunes filles)


On a bouleversé la terre avec des mots.  (A quoi rêvent les jeunes filles)


L'incertitude est de tous les tourments le plus difficile à supporter.  (La Confession d'un enfant du siècle)


On prend toujours le mal pour éviter le pire.  (A quoi rêvent les jeunes filles)


Douces ou amères, les larmes soulagent toujours.  (Un Caprice)


Où va l'homme ?
Où son coeur l'appelle.



Tu trouveras, dans la joie ou dans la peine,
Ma triste main pour soutenir la tienne,
Mon triste coeur pour écouter le tien.



Qui peut lécher peut mordre, et qui peut embrasser peut étouffer.


De quelque fol amour qu'on ait rempli son coeur
Le désir est parfois moins grand que le bonheur.
  (Portia)


L'enfant marche joyeux, sans songer au chemin ;
Il le croit infini, n'en voyant pas la fin.
  (Premières poésies)







La vie est une rose dont chaque pétale est une illusion et chaque épine une réalité.


C'est tenter Dieu que d'aimer la douleur.  (Stances à la Malibran)


On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime.  (On ne badine pas avec l'amour)


Pour réussir dans le monde, retenez bien ces trois maximes : voir, c'est savoir ; vouloir, c'est pouvoir ; oser, c'est avoir.  (Barberine)


Le mal existe, mais pas sans le bien, comme l'ombre existe, mais pas sans la lumière.  (Lorenzaccio)


Qui aima jamais porte une cicatrice.  (Lettre à Lamartine)


Tout vrai regard est un désir.


Prenez garde à un homme qui demande un pardon ; il peut avoir si aisément la tentation d'en mériter deux !  (La Nuit vénitienne)


Ah ! celui-là vit mal qui ne vit que pour soi !


Etrange chose que l'homme qui souffre veuille faire souffrir ce qu'il aime !  (La Confession d'un enfant du siècle)


Il n'y a de vrai au monde que de déraisonner d'amour.  (Il ne faut jurer de rien)


L'enthousiasme est frère de la souffrance.  (Lorenzaccio)


Tous les amours ne se ressemblent pas. Toutes les maîtresses se ressemblent.  (Le roman par lettres)
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#1
    Tóc nâu 26.01.2011 22:40:32 (permalink)





    Les poèmes d' Alfred de Musset :


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    A UNE  FLEUR


    Que me veux-tu chère fleurette,
    Aimable et charmant souvenir?
    Demi-morte et demi-coquette,
    Jusqu'à moi qui te fait venir ?

    Sous ce cachet enveloppée,
    Tu viens de faire un long chemin.
    Qu'as-tu vu? que t'a dit la main
    Qui sur le buisson t'a coupée?

    N'es-tu qu'une herbe desséchée
    Qui vient achever de mourir ?
    Ou ton sein, prêt à refleurir,
    Renferme-t-il une pensée ?

    Ta fleur, hélas! a la blancheur
    De la désolante innocence;
    Mais de la craintive espérance
    Ta feuille porte la couleur.

    As-tu pour moi quelque message ?
    Tu peux parler, je suis discret.
    Ta verdure est-elle un secret?
    Ton parfum est-il un langage ?

    S'il en est ainsi, parle bas,
    Mystérieuse messagère;
    S'il n'en est rien, ne réponds pas;
    Dors sur mon coeur, fraîche et légère.

    Je connais trop bien cette main,
    Pleine de grâce et de caprice,
    Qui d'un brin de fil souple et fin
    A noué ton pâle calice.

    Cette main-là, petite fleur,
    Ni Phidias ni Praxitèle
    N'en auraient pu trouver la soeur
    Qu'en prenant Vénus pour modèle.

    Mais elle est sage, elle est sévère;
    Quelque mal pourrait m'arriver.
    Fleurette, craignons sa colère.
    Ne dis rien, laisse-moi rêver.



    1838







    VENISE


    Dans Venise la rouge,
    Pas un bateau qui bouge*,
    Pas un pêcheur dans l'eau,
    Pas un falot.

    Seul, assis à la grève,
    Le grand lion soulève,
    Sur l'horizon serein,
    Son pied d'airain.

    Autour de lui, par groupes,
    Navires et chaloupes,
    Pareils à des hérons
    Couchés en ronds,

    Dorment sur l'eau qui fume,
    Et croisent dans la brume,
    En légers tourbillons,
    Leurs pavillons.

    La lune qui s'efface
    Couvre son front qui passe
    D'un nuage étoilé
    Demi-voilé.

    Ainsi, la dame abbesse
    De Sainte-Croix rabaisse
    Sa cape aux larges plis
    Sur son surplis.

    Et les palais antiques,
    Et les graves portiques,
    Et les blancs escaliers
    Des chevaliers,

    Et les ponts, et les rues,
    Et les mornes statues,
    Et le golfe mouvant
    Qui tremble au vent,

    Tout se tait, fors les gardes
    Aux longues hallebardes,
    Qui veillent aux créneaux
    Des arsenaux.

    -Ah ! maintenant plus d'une
    Attend, au clair de lune,
    Quelque jeune muguet,
    L'oreille au guet.

    Pour le bal qu'on prépare,
    Plus d'une qui se pare,
    Met devant son miroir
    Le masque noir.

    Sur sa couche embaumée,
    La Vanina pâmée
    Presse encor son amant,
    En s'endormant;

    Et Narcissa, la folle,
    Au fond de sa gondole,
    S'oublie en un festin
    Jusqu'au matin.

    Et qui, dans l'Italie,
    N'a son grain de folie?
    Qui ne garde aux amours
    Ses plus beaux jours?

    Laissons la vieille horloge,
    Au palais du vieux doge,
    Lui compter de ses nuits
    Les longs ennuis.

    Comptons plutôt, ma belle,
    Sur ta bouche rebelle
    Tant de baisers donnés...
    Ou pardonnés.

    Comptons plutôt tes charmes,
    Comptons les douces larmes,
    Qu'à nos yeux a coûté
    La volupté!


    1828


    (*) Dans la première édition in-8° (Contes d'Espagne et d'Italie) , on
    lit "Pas un cheval qui bouge". On sait qu'il n'y a point de chevaux
    à Venise. L'auteur corrigea cette faute, lorsque ses poésies furent
    réimprimées, en 1840.





    ( tài liệu sưu tầm từ net. ) à suivre....


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    #2
      Tóc nâu 11.02.2011 19:10:09 (permalink)





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      A  mademoiselle



      Oui, femmes, quoi qu'on puisse dire,
      Vous avez le fatal pouvoir
      De nous jeter par un sourire
      Dans l'ivresse ou le désespoir.

      Oui, deux mots, le silence même,
      Un regard distrait ou moqueur,
      Peuvent donner à qui vous aime
      Un coup de poignard dans le coeur.

      Oui, votre orgueil doit être immense,
      Car, grâce à notre lâcheté,
      Rien n'égale votre puissance,
      Sinon votre fragilité.

      Mais toute puissance sur terre
      Meurt quand l'abus en est trop grand,
      Et qui sait souffrir et se taire
      S'éloigne de vous en pleurant.

      Quel que soit le mal qu'il endure,
      Son triste rôle est le plus beau.
      J'aime encor mieux notre torture
      Que votre métier de bourreau.



      Alfred  de Musset

      11 Janvier 1839



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      #3
        sen dat 13.02.2011 13:01:33 (permalink)
        Chào TN!
        Theo SĐ thì tác phẩm La Nuit de mai của Musset được coi như là một tác phẩm lớn vì nó chứa chất những suy tư ẩn ức của con người nói chung ví dụ như câu:" Rien ne nous rend si grands qu’une grande douleur”, “Viens chantons devant Dieu, chantons dans tes pensés, dans tes plaisirs perdus, dans tes peines passées; Partons, dans un baiser, pour un monde inconnu.” “La bouche garde le silence,pour écouter parler le coeur”, “les plus désespérés sont les chants les plus beaux, et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots.” Cái câu cuối cùng này của Musset làm SĐ nhớ tới cái tựa tiểu thuyết nổi tiếng “The thorn birds – Les oiseaux se cachent pour mourir - Những con chim ẩn mình chờ chết "–gợi lại một truyền thuyết về một loài chim ngay khi vừa rời tổ đã đi tìm ngay một thứ cây cỏ cành đầy gai nhọn và tiếp tục bay mãi không chịu ngơi nghỉ cho tới khi tìm được mới thôi, rồi đậu trên cành cất tiếng hót trước khi lao thẳng vào cây gai, gai nhọn hoắt xuyên thủng qua ngực trong cơn hấp hối chim vẫn say sưa hát…Trong cơn  đau đớn  tột cùng vì gai xuyên thủng tim, tiếng hót lại càng trỗi lên cao vút tuyệt vời hơn bao giờ hết…Chúc TN một ngày valentine thật ngọt ngào!
         
        <bài viết được chỉnh sửa lúc 13.02.2011 13:04:50 bởi sen dat >
        #4
          Tóc nâu 14.02.2011 04:55:34 (permalink)
          Xin chào và cảm ơn S Đ lời chúc , ngược lại TN cùng chúc SĐ  y như vậy nha!

          ***
          La nuit de mai, La nuit d'août, La nuit d' octobre ,.... ce sont les longues conversations en vers entre le poète et la muse !
          Je ne veux pas les imposer dès le début , si qu'on est pas pressé !
          Il faut les savourer en lisant lentement , êtes - vous d'accord avec moi ?

          Je vous remercie infiniment d'avoir visité et laissé un commentaire, cela m'encourage beaucoup!

          Bonne journée Sen Đất !


          ***


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          LA  NUIT  DE  MAI


          LA MUSE

          Poète, prends ton luth et me donne un baiser ;
          La fleur de l'églantier sent ses bourgeons éclore,
          Le printemps naît ce soir ; les vents vont s'embraser ;
          Et la bergeronnette, en attendant l'aurore,
          Aux premiers buissons verts commence à se poser.
          Poète, prends ton luth, et me donne un baiser.

          LE POÈTE

          Comme il fait noir dans la vallée !
          J'ai cru qu'une forme voilée
          Flottait là-bas sur la forêt.
          Elle sortait de la prairie ;
          Son pied rasait l'herbe fleurie ;
          C'est une étrange rêverie ;
          Elle s'efface et disparaît.

          LA MUSE

          Poète, prends ton luth ; la nuit, sur la pelouse,
          Balance le zéphyr dans son voile odorant.
          La rose, vierge encor, se referme jalouse
          Sur le frelon nacré qu'elle enivre en mourant.
          Écoute ! tout se tait ; songe à ta bien-aimée.
          Ce soir, sous les tilleuls, à la sombre ramée
          Le rayon du couchant laisse un adieu plus doux.
          Ce soir, tout va fleurir : l'immortelle nature
          Se remplit de parfums, d'amour et de murmure,
          Comme le lit joyeux de deux jeunes époux.

          LE POÈTE

          Pourquoi mon coeur bat-il si vite ?
          Qu'ai-je donc en moi qui s'agite
          Dont je me sens épouvanté ?
          Ne frappe-t-on pas à ma porte ?
          Pourquoi ma lampe à demi morte
          M'éblouit-elle de clarté ?
          Dieu puissant ! tout mon corps frissonne.
          Qui vient ? qui m'appelle ? - Personne.
          Je suis seul ; c'est l'heure qui sonne ;
          Ô solitude ! ô pauvreté !

          LA MUSE

          Poète, prends ton luth ; le vin de la jeunesse
          Fermente cette nuit dans les veines de Dieu.
          Mon sein est inquiet ; la volupté l'oppresse,
          Et les vents altérés m'ont mis la lèvre en feu.
          Ô paresseux enfant ! regarde, je suis belle.
          Notre premier baiser, ne t'en souviens-tu pas,
          Quand je te vis si pâle au toucher de mon aile,
          Et que, les yeux en pleurs, tu tombas dans mes bras ?
          Ah ! je t'ai consolé d'une amère souffrance !
          Hélas ! bien jeune encor, tu te mourais d'amour.
          Console-moi ce soir, je me meurs d'espérance ;
          J'ai besoin de prier pour vivre jusqu'au jour.

          LE POÈTE

          Est-ce toi dont la voix m'appelle,
          Ô ma pauvre Muse ! est-ce toi ?
          Ô ma fleur ! ô mon immortelle !
          Seul être pudique et fidèle
          Où vive encor l'amour de moi !
          Oui, te voilà, c'est toi, ma blonde,
          C'est toi, ma maîtresse et ma soeur !
          Et je sens, dans la nuit profonde,
          De ta robe d'or qui m'inonde
          Les rayons glisser dans mon coeur.

          LA MUSE

          Poète, prends ton luth ; c'est moi, ton immortelle,
          Qui t'ai vu cette nuit triste et silencieux,
          Et qui, comme un oiseau que sa couvée appelle,
          Pour pleurer avec toi descends du haut des cieux.
          Viens, tu souffres, ami. Quelque ennui solitaire
          Te ronge, quelque chose a gémi dans ton coeur ;
          Quelque amour t'est venu, comme on en voit sur terre,
          Une ombre de plaisir, un semblant de bonheur.

          Viens, chantons devant Dieu ; chantons dans tes pensées,
          Dans tes plaisirs perdus, dans tes peines passées ;
          Partons, dans un baiser, pour un monde inconnu,
          Éveillons au hasard les échos de ta vie,
          Parlons-nous de bonheur, de gloire et de folie,
          Et que ce soit un rêve, et le premier venu.
          Inventons quelque part des lieux où l'on oublie ;
          Partons, nous sommes seuls, l'univers est à nous.

          Voici la verte Écosse et la brune Italie,
          Et la Grèce, ma mère, où le miel est si doux,
          Argos, et Ptéléon, ville des hécatombes,
          Et Messa la divine, agréable aux colombes,
          Et le front chevelu du Pélion changeant ;
          Et le bleu Titarèse, et le golfe d'argent
          Qui montre dans ses eaux, où le cygne se mire,
          La blanche Oloossone à la blanche Camyre.

          Dis-moi, quel songe d'or nos chants vont-ils bercer ?
          D'où vont venir les pleurs que nous allons verser ?
          Ce matin, quand le jour a frappé ta paupière,
          Quel séraphin pensif, courbé sur ton chevet,
          Secouait des lilas dans sa robe légère,
          Et te contait tout bas les amours qu'il rêvait ?
          Chanterons-nous l'espoir, la tristesse ou la joie ?
          Tremperons-nous de sang les bataillons d'acier ?
          Suspendrons-nous l'amant sur l'échelle de soie ?
          Jetterons-nous au vent l'écume du coursier ?

          Dirons-nous quelle main, dans les lampes sans nombre
          De la maison céleste, allume nuit et jour
          L'huile sainte de vie et d'éternel amour ?
          Crierons-nous à Tarquin : " Il est temps, voici l'ombre ! "
          Descendrons-nous cueillir la perle au fond des mers ?
          Mènerons-nous la chèvre aux ébéniers amers ?
          Montrerons-nous le ciel à la Mélancolie ?
          Suivrons-nous le chasseur sur les monts escarpés ?
          La biche le regarde ; elle pleure et supplie ;
          Sa bruyère l'attend ; ses faons sont nouveau-nés ;
          Il se baisse, il l'égorge, il jette à la curée

          Sur les chiens en sueur son coeur encor vivant.
          Peindrons-nous une vierge à la joue empourprée,
          S'en allant à la messe, un page la suivant,
          Et d'un regard distrait, à côté de sa mère,
          Sur sa lèvre entr'ouverte oubliant sa prière ?
          Elle écoute en tremblant, dans l'écho du pilier,
          Résonner l'éperon d'un hardi cavalier.

          Dirons-nous aux héros des vieux temps de la France
          De monter tout armés aux créneaux de leurs tours,
          Et de ressusciter la naïve romance
          Que leur gloire oubliée apprit aux troubadours ?
          Vêtirons-nous de blanc une molle élégie ?
          L'homme de Waterloo nous dira-t-il sa vie,
          Et ce qu'il a fauché du troupeau des humains
          Avant que l'envoyé de la nuit éternelle
          Vînt sur son tertre vert l'abattre d'un coup d'aile,
          Et sur son coeur de fer lui croiser les deux mains ?

          Clouerons-nous au poteau d'une satire altière
          Le nom sept fois vendu d'un pâle pamphlétaire,
          Qui, poussé par la faim, du fond de son oubli,
          S'en vient, tout grelottant d'envie et d'impuissance,
          Sur le front du génie insulter l'espérance,
          Et mordre le laurier que son souffle a sali ?
          Prends ton luth ! prends ton luth ! je ne peux plus me taire ;
          Mon aile me soulève au souffle du printemps.
          Le vent va m'emporter ; je vais quitter la terre.
          Une larme de toi ! Dieu m'écoute ; il est temps.

          LE POÈTE

          S'il ne te faut, ma soeur chérie,
          Qu'un baiser d'une lèvre amie
          Et qu'une larme de mes yeux,
          Je te les donnerai sans peine ;
          De nos amours qu'il te souvienne,
          Si tu remontes dans les cieux.
          Je ne chante ni l'espérance,
          Ni la gloire, ni le bonheur,
          Hélas ! pas même la souffrance.
          La bouche garde le silence
          Pour écouter parler le coeur.

          LA MUSE

          Crois-tu donc que je sois comme le vent d'automne,
          Qui se nourrit de pleurs jusque sur un tombeau,
          Et pour qui la douleur n'est qu'une goutte d'eau ?
          Ô poète ! un baiser, c'est moi qui te le donne.
          L'herbe que je voulais arracher de ce lieu,
          C'est ton oisiveté ; ta douleur est à Dieu.

          Quel que soit le souci que ta jeunesse endure,
          Laisse-la s'élargir, cette sainte blessure
          Que les noirs séraphins t'ont faite au fond du coeur :
          Rien ne nous rend si grands qu'une grande douleur.
          Mais, pour en être atteint, ne crois pas, ô poète,
          Que ta voix ici-bas doive rester muette.
          Les plus désespérés sont les chants les plus beaux,
          Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots.

          Lorsque le pélican, lassé d'un long voyage,
          Dans les brouillards du soir retourne à ses roseaux,
          Ses petits affamés courent sur le rivage
          En le voyant au loin s'abattre sur les eaux.
          Déjà, croyant saisir et partager leur proie,
          Ils courent à leur père avec des cris de joie
          En secouant leurs becs sur leurs goitres hideux.
          Lui, gagnant à pas lents une roche élevée,
          De son aile pendante abritant sa couvée,
          Pêcheur mélancolique, il regarde les cieux.

          Le sang coule à longs flots de sa poitrine ouverte ;
          En vain il a des mers fouillé la profondeur ;
          L'Océan était vide et la plage déserte ;
          Pour toute nourriture il apporte son coeur.
          Sombre et silencieux, étendu sur la pierre
          Partageant à ses fils ses entrailles de père,
          Dans son amour sublime il berce sa douleur,
          Et, regardant couler sa sanglante mamelle,
          Sur son festin de mort il s'affaisse et chancelle,
          Ivre de volupté, de tendresse et d'horreur.

          Mais parfois, au milieu du divin sacrifice,
          Fatigué de mourir dans un trop long supplice,
          Il craint que ses enfants ne le laissent vivant ;
          Alors il se soulève, ouvre son aile au vent,
          Et, se frappant le coeur avec un cri sauvage,
          Il pousse dans la nuit un si funèbre adieu,
          Que les oiseaux des mers désertent le rivage,
          Et que le voyageur attardé sur la plage,
          Sentant passer la mort, se recommande à Dieu.

          Poète, c'est ainsi que font les grands poètes.
          Ils laissent s'égayer ceux qui vivent un temps ;
          Mais les festins humains qu'ils servent à leurs fêtes
          Ressemblent la plupart à ceux des pélicans.
          Quand ils parlent ainsi d'espérances trompées,
          De tristesse et d'oubli, d'amour et de malheur,
          Ce n'est pas un concert à dilater le coeur.
          Leurs déclamations sont comme des épées :
          Elles tracent dans l'air un cercle éblouissant,
          Mais il y pend toujours quelque goutte de sang.

          LE POÈTE

          Ô Muse ! spectre insatiable,
          Ne m'en demande pas si long.
          L'homme n'écrit rien sur le sable
          À l'heure où passe l'aquilon.
          J'ai vu le temps où ma jeunesse
          Sur mes lèvres était sans cesse
          Prête à chanter comme un oiseau ;
          Mais j'ai souffert un dur martyre,
          Et le moins que j'en pourrais dire,
          Si je l'essayais sur ma lyre,
          La briserait comme un roseau.



          Alfred  de  Musset  





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          #5
            Tóc nâu 04.03.2011 05:31:22 (permalink)




            IMPROMPTU


            (En réponse à la question : Qu'est-ce que la Poésie ? )



            Chasser tout souvenir et fixer sa pensée,
            Sur un bel axe d'or la tenir balancée,
            Incertaine, inquiète, immobile pourtant,
            Peut-être éterniser le rêve d'un instant ;
            Aimer le vrai, le beau, chercher leur harmonie ;
            Écouter dans son coeur l'écho de son génie ;
            Chanter, rire, pleurer, seul, sans but, au hasard ;
            D'un sourire, d'un mot, d'un soupir, d'un regard
            Faire un travail exquis, plein de crainte et de charme
            Faire une perle d'une larme :
            Du poète ici-bas voilà la passion,
            Voilà son bien, sa vie et son ambition.



            Alfred  de  Musset







            #6
              sen dat 23.03.2011 23:49:40 (permalink)
              Nuits:chants pathetiques de l'amour et de la souffrance,  vers harmonieux qui donne à la poésie la peinture exacte d'une grande douleur, ce vers on l'appliquera non seulement a Musset mais aux autres grands poètes à la condition de bien définir le mot douleur. Un pure chef d'oeuvre de poésie lyrique.
              #7
                Tóc nâu 18.08.2011 20:46:13 (permalink)



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                La  Nuit  d'Août


                LA MUSE

                Depuis que le soleil, dans l'horizon immense,
                A franchi le Cancer sur son axe enflammé,
                Le bonheur m'a quittée, et j'attends en silence
                L'heure où m'appellera mon ami bien-aimé.
                Hélas ! depuis longtemps sa demeure est déserte ;
                Des beaux jours d'autrefois rien n'y semble vivant.
                Seule, je viens encor, de mon voile couverte,
                Poser mon front brûlant sur sa porte entr'ouverte,
                Comme une veuve en pleurs au tombeau d'un enfant.


                LE POÈTE

                Salut à ma fidèle amie !
                Salut, ma gloire et mon amour !
                La meilleure et la plus chérie
                Est celle qu'on trouve au retour.
                L'opinion et l'avarice
                Viennent un temps de m'emporter.
                Salut, ma mère et ma nourrice !
                Salut, salut consolatrice !
                Ouvre tes bras, je viens chanter.


                LA MUSE

                Pourquoi, coeur altéré, coeur lassé d'espérance,
                T'enfuis-tu si souvent pour revenir si tard ?
                Que t'en vas-tu chercher, sinon quelque hasard ?
                Et que rapportes-tu, sinon quelque souffrance ?
                Que fais-tu loin de moi, quand j'attends jusqu'au jour ?
                Tu suis un pâle éclair dans une nuit profonde.
                Il ne te restera de tes plaisirs du monde
                Qu'un impuissant mépris pour notre honnête amour.
                Ton cabinet d'étude est vide quand j'arrive ;
                Tandis qu'à ce balcon, inquiète et pensive,
                Je regarde en rêvant les murs de ton jardin,
                Tu te livres dans l'ombre à ton mauvais destin.
                Quelque fière beauté te retient dans sa chaîne,
                Et tu laisses mourir cette pauvre verveine
                Dont les derniers rameaux, en des temps plus heureux,
                Devaient être arrosés des larmes de tes yeux.
                Cette triste verdure est mon vivant symbole ;
                Ami, de ton oubli nous mourrons toutes deux,
                Et son parfum léger, comme l'oiseau qui vole,
                Avec mon souvenir s'enfuira dans les cieux.


                LE POÈTE

                Quand j'ai passé par la prairie,
                J'ai vu, ce soir, dans le sentier,
                Une fleur tremblante et flétrie,
                Une pâle fleur d'églantier.
                Un bourgeon vert à côté d'elle
                Se balançait sur l'arbrisseau ;
                Je vis poindre une fleur nouvelle ;
                La plus jeune était la plus belle :
                L'homme est ainsi, toujours nouveau.


                LA MUSE

                Hélas ! toujours un homme, hélas ! toujours des larmes !
                Toujours les pieds poudreux et la sueur au front !
                Toujours d'affreux combats et de sanglantes armes ;
                Le coeur a beau mentir, la blessure est au fond.
                Hélas ! par tous pays, toujours la même vie :
                Convoiter, regretter, prendre et tendre la main ;
                Toujours mêmes acteurs et même comédie,
                Et, quoi qu'ait inventé l'humaine hypocrisie,
                Rien de vrai là-dessous que le squelette humain.
                Hélas ! mon bien-aimé, vous n'êtes plus poète.
                Rien ne réveille plus votre lyre muette ;
                Vous vous noyez le coeur dans un rêve inconstant ;
                Et vous ne savez pas que l'amour de la femme
                Change et dissipe en pleurs les trésors de votre âme,
                Et que Dieu compte plus les larmes que le sang.


                LE POÈTE

                Quand j'ai traversé la vallée,
                Un oiseau chantait sur son nid.
                Ses petits, sa chère couvée,
                Venaient de mourir dans la nuit.
                Cependant il chantait l'aurore ;
                Ô ma Muse, ne pleurez pas !
                À qui perd tout, Dieu reste encore,
                Dieu là-haut, l'espoir ici-bas.


                LA MUSE

                Et que trouveras-tu, le jour où la misère
                Te ramènera seul au paternel foyer ?
                Quand tes tremblantes mains essuieront la poussière
                De ce pauvre réduit que tu crois oublier,
                De quel front viendras-tu, dans ta propre demeure,
                Chercher un peu de calme et d'hospitalité ?
                Une voix sera là pour crier à toute heure :
                Qu'as-tu fait de ta vie et de ta liberté ?
                Crois-tu donc qu'on oublie autant qu'on le souhaite ?
                Crois-tu qu'en te cherchant tu te retrouveras ?
                De ton coeur ou de toi lequel est le poète ?
                C'est ton coeur, et ton coeur ne te répondra pas.
                L'amour l'aura brisé ; les passions funestes
                L'auront rendu de pierre au contact des méchants ;
                Tu n'en sentiras plus que d'effroyables restes,
                Qui remueront encor, comme ceux des serpents.
                Ô ciel ! qui t'aidera ? que ferai-je moi-même,
                Quand celui qui peut tout défendra que je t'aime,
                Et quand mes ailes d'or, frémissant malgré moi,
                M'emporteront à lui pour me sauver de toi ?
                Pauvre enfant ! nos amours n'étaient pas menacées,
                Quand dans les bois d'Auteuil, perdu dans tes pensées,
                Sous les verts marronniers et les peupliers blancs,
                Je t'agaçais le soir en détours nonchalants.
                Ah ! j'étais jeune alors et nymphe, et les dryades
                Entr'ouvraient pour me voir l'écorce des bouleaux,
                Et les pleurs qui coulaient durant nos promenades
                Tombaient, purs comme l'or, dans le cristal des eaux.
                Qu'as-tu fait, mon amant, des jours de ta jeunesse ?
                Qui m'a cueilli mon fruit sur mon arbre enchanté ?
                Hélas ! ta joue en fleur plaisait à la déesse
                Qui porte dans ses mains la force et la santé.
                De tes yeux insensés les larmes l'ont pâlie ;
                Ainsi que ta beauté, tu perdras ta vertu.
                Et moi qui t'aimerai comme une unique amie,
                Quand les dieux irrités m'ôteront ton génie,
                Si je tombe des cieux, que me répondras-tu ?


                LE POÈTE

                Puisque l'oiseau des bois voltige et chante encore
                Sur la branche où ses oeufs sont brisés dans le nid ;
                Puisque la fleur des champs entr'ouverte à l'aurore,
                Voyant sur la pelouse une autre fleur éclore,
                S'incline sans murmure et tombe avec la nuit,

                Puisqu'au fond des forêts, sous les toits de verdure,
                On entend le bois mort craquer dans le sentier,
                Et puisqu'en traversant l'immortelle nature,
                L'homme n'a su trouver de science qui dure,
                Que de marcher toujours et toujours oublier ;

                Puisque, jusqu'aux rochers tout se change en poussière ;
                Puisque tout meurt ce soir pour revivre demain ;
                Puisque c'est un engrais que le meurtre et la guerre ;
                Puisque sur une tombe on voit sortir de terre
                Le brin d'herbe sacré qui nous donne le pain ;

                Ô Muse ! que m'importe ou la mort ou la vie ?
                J'aime, et je veux pâlir ; j'aime et je veux souffrir ;
                J'aime, et pour un baiser je donne mon génie ;
                J'aime, et je veux sentir sur ma joue amaigrie
                Ruisseler une source impossible à tarir.

                J'aime, et je veux chanter la joie et la paresse,
                Ma folle expérience et mes soucis d'un jour,
                Et je veux raconter et répéter sans cesse
                Qu'après avoir juré de vivre sans maîtresse,
                J'ai fait serment de vivre et de mourir d'amour.

                Dépouille devant tous l'orgueil qui te dévore,
                Coeur gonflé d'amertume et qui t'es cru fermé.
                Aime, et tu renaîtras ; fais-toi fleur pour éclore.
                Après avoir souffert, il faut souffrir encore ;
                Il faut aimer sans cesse, après avoir aimé.



                Alfred  de Musset






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                #8
                  Tóc nâu 20.10.2011 00:14:26 (permalink)


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                  La  Nuit  d'Octobre


                  LE POÈTE

                  Le mal dont j'ai souffert s'est enfui comme un rêve.
                  Je n'en puis comparer le lointain souvenir
                  Qu'à ces brouillards légers que l'aurore soulève,
                  Et qu'avec la rosée on voit s'évanouir.

                  LA MUSE

                  Qu'aviez-vous donc, ô mon poète !
                  Et quelle est la peine secrète
                  Qui de moi vous a séparé ?
                  Hélas ! je m'en ressens encore.
                  Quel est donc ce mal que j'ignore
                  Et dont j'ai si longtemps pleuré ?


                  LE POÈTE

                  C'était un mal vulgaire et bien connu des hommes ;
                  Mais, lorsque nous avons quelque ennui dans le coeur,
                  Nous nous imaginons, pauvres fous que nous sommes,
                  Que personne avant nous n'a senti la douleur.


                  LA MUSE

                  Il n'est de vulgaire chagrin
                  Que celui d'une âme vulgaire.
                  Ami, que ce triste mystère
                  S'échappe aujourd'hui de ton sein.
                  Crois-moi, parle avec confiance ;
                  Le sévère dieu du silence
                  Est un des frères de la Mort ;
                  En se plaignant on se console,
                  Et quelquefois une parole
                  Nous a délivrés d'un remord.


                  LE POÈTE

                  S'il fallait maintenant parler de ma souffrance,
                  Je ne sais trop quel nom elle devrait porter,
                  Si c'est amour, folie, orgueil, expérience,
                  Ni si personne au monde en pourrait profiter.
                  Je veux bien toutefois t'en raconter l'histoire,
                  Puisque nous voilà seuls, assis près du foyer.
                  Prends cette lyre, approche, et laisse ma mémoire
                  Au son de tes accords doucement s'éveiller.


                  LA MUSE

                  Avant de me dire ta peine,
                  Ô poète ! en es-tu guéri ?
                  Songe qu'il t'en faut aujourd'hui
                  Parler sans amour et sans haine.
                  S'il te souvient que j'ai reçu
                  Le doux nom de consolatrice,
                  Ne fais pas de moi la complice
                  Des passions qui t'ont perdu,


                  LE POÈTE

                  Je suis si bien guéri de cette maladie,
                  Que j'en doute parfois lorsque j'y veux songer ;
                  Et quand je pense aux lieux où j'ai risqué ma vie,
                  J'y crois voir à ma place un visage étranger.
                  Muse, sois donc sans crainte ; au souffle qui t'inspire
                  Nous pouvons sans péril tous deux nous confier.
                  Il est doux de pleurer, il est doux de sourire
                  Au souvenir des maux qu'on pourrait oublier.


                  LA MUSE

                  Comme une mère vigilante
                  Au berceau d'un fils bien-aimé,
                  Ainsi je me penche tremblante
                  Sur ce coeur qui m'était fermé.
                  Parle, ami, - ma lyre attentive
                  D'une note faible et plaintive
                  Suit déjà l'accent de ta voix,
                  Et dans un rayon de lumière,
                  Comme une vision légère,
                  Passent les ombres d'autrefois.


                  LE POÈTE

                  Jours de travail ! seuls jours où j'ai vécu !
                  Ô trois fois chère solitude !
                  Dieu soit loué, j'y suis donc revenu,
                  À ce vieux cabinet d'étude !
                  Pauvre réduit, murs tant de fois déserts,
                  Fauteuils poudreux, lampe fidèle,
                  Ô mon palais, mon petit univers,
                  Et toi, Muse, ô jeune immortelle,
                  Dieu soit loué, nous allons donc chanter !
                  Oui, je veux vous ouvrir mon âme,
                  Vous saurez tout, et je vais vous conter
                  Le mal que peut faire une femme ;
                  Car c'en est une, ô mes pauvres amis
                  (Hélas ! vous le saviez peut-être),
                  C'est une femme à qui je fus soumis,
                  Comme le serf l'est à son maître.
                  Joug détesté ! c'est par là que mon coeur
                  Perdit sa force et sa jeunesse ; -
                  Et cependant, auprès de ma maîtresse,
                  J'avais entrevu le bonheur.
                  Près du ruisseau, quand nous marchions ensemble,
                  Le soir, sur le sable argentin,
                  Quand devant nous le blanc spectre du tremble
                  De loin nous montrait le chemin ;
                  Je vois encore, aux rayons de la lune,
                  Ce beau corps plier dans mes bras...
                  N'en parlons plus... - je ne prévoyais pas
                  Où me conduirait la Fortune.
                  Sans doute alors la colère des dieux
                  Avait besoin d'une victime ;
                  Car elle m'a puni comme d'un crime
                  D'avoir essayé d'être heureux.


                  LA MUSE

                  L'image d'un doux souvenir
                  Vient de s'offrir à ta pensée.
                  Sur la trace qu'il a laissée
                  Pourquoi crains-tu de revenir ?
                  Est-ce faire un récit fidèle
                  Que de renier ses beaux jours ?
                  Si ta fortune fut cruelle,
                  Jeune homme, fais du moins comme elle,
                  Souris à tes premiers amours.


                  LE POÈTE

                  Non, - c'est à mes malheurs que je prétends sourire.
                  Muse, je te l'ai dit : je veux, sans passion,
                  Te conter mes ennuis, mes rêves, mon délire,
                  Et t'en dire le temps, l'heure et l'occasion.
                  C'était, il m'en souvient, par une nuit d'automne,
                  Triste et froide, à peu près semblable à celle-ci ;
                  Le murmure du vent, de son bruit monotone,
                  Dans mon cerveau lassé berçait mon noir souci.
                  J'étais à la fenêtre, attendant ma maîtresse ;
                  Et, tout en écoutant dans cette obscurité,
                  Je me sentais dans l'âme une telle détresse
                  Qu'il me vint le soupçon d'une infidélité.
                  La rue où je logeais était sombre et déserte ;
                  Quelques ombres passaient, un falot à la main ;
                  Quand la bise sifflait dans la porte entr'ouverte,
                  On entendait de loin comme un soupir humain.
                  Je ne sais, à vrai dire, à quel fâcheux présage
                  Mon esprit inquiet alors s'abandonna.
                  Je rappelais en vain un reste de courage,
                  Et me sentis frémir lorsque l'heure sonna.
                  Elle ne venait pas. Seul, la tête baissée,
                  Je regardai longtemps les murs et le chemin, -
                  Et je ne t'ai pas dit quelle ardeur insensée
                  Cette inconstante femme allumait en mon sein ;
                  Je n'aimais qu'elle au monde, et vivre un jour sans elle
                  Me semblait un destin plus affreux que la mort.
                  Je me souviens pourtant qu'en cette nuit cruelle
                  Pour briser mon lien je fis un long effort.
                  Je la nommai cent fois perfide et déloyale,
                  Je comptai tous les maux qu'elle m'avait causés.
                  Hélas ! au souvenir de sa beauté fatale,
                  Quels maux et quels chagrins n'étaient pas apaisés !
                  Le jour parut enfin. - Las d'une vaine attente,
                  Sur le bord du balcon je m'étais assoupi ;
                  Je rouvris la paupière à l'aurore naissante,
                  Et je laissai flotter mon regard ébloui.
                  Tout à coup, au détour de l'étroite ruelle,
                  J'entends sur le gravier marcher à petit bruit...
                  Grand Dieu ! préservez-moi ! je l'aperçois, c'est elle ;
                  Elle entre. - D'où viens-tu ? Qu'as-tu fait cette nuit ?
                  Réponds, que me veux-tu ? qui t'amène à cette heure ?
                  Ce beau corps, jusqu'au jour, où s'est-il étendu ?
                  Tandis qu'à ce balcon, seul, je veille et je pleure,
                  En quel lieu, dans quel lit, à qui souriais-tu ?
                  Perfide ! audacieuse ! est-il encor possible
                  Que tu viennes offrir ta bouche à mes baisers ?
                  Que demandes-tu donc ? par quelle soif horrible
                  Oses-tu m'attirer dans tes bras épuisés ?
                  Va-t'en, retire-toi, spectre de ma maîtresse !
                  Rentre dans ton tombeau, si tu t'en es levé ;
                  Laisse-moi pour toujours oublier ma jeunesse,
                  Et, quand je pense à toi, croire que j'ai rêvé !


                  LA MUSE

                  Apaise-toi, je t'en conjure ;
                  Tes paroles m'ont fait frémir.
                  Ô mon bien-aimé ! ta blessure
                  Est encor prête à se rouvrir.
                  Hélas ! elle est donc bien profonde ?
                  Et les misères de ce monde
                  Sont si lentes à s'effacer !
                  Oublie, enfant, et de ton âme
                  Chasse le nom de cette femme,
                  Que je ne veux pas prononcer.


                  LE POÈTE

                  Honte à toi qui la première
                  M'as appris la trahison,
                  Et d'horreur et de colère
                  M'as fait perdre la raison !
                  Honte à toi, femme à l'oeil sombre,
                  Dont les funestes amours
                  Ont enseveli dans l'ombre
                  Mon printemps et mes beaux jours !
                  C'est ta voix, c'est ton sourire,
                  C'est ton regard corrupteur,
                  Qui m'ont appris à maudire
                  Jusqu'au semblant du bonheur ;
                  C'est ta jeunesse et tes charmes
                  Qui m'ont fait désespérer,
                  Et si je doute des larmes,
                  C'est que je t'ai vu pleurer.
                  Honte à toi, j'étais encore
                  Aussi simple qu'un enfant ;
                  Comme une fleur à l'aurore,
                  Mon coeur s'ouvrait en t'aimant.
                  Certes, ce coeur sans défense
                  Put sans peine être abusé ;
                  Mais lui laisser l'innocence
                  Était encor plus aisé.
                  Honte à toi ! tu fus la mère
                  De mes premières douleurs,
                  Et tu fis de ma paupière
                  Jaillir la source des pleurs !
                  Elle coule, sois-en sûre,
                  Et rien ne la tarira ;
                  Elle sort d'une blessure
                  Qui jamais ne guérira ;
                  Mais dans cette source amère
                  Du moins je me laverai,
                  Et j'y laisserai, j'espère,
                  Ton souvenir abhorré !


                  LA MUSE

                  Poète, c'est assez. Auprès d'une infidèle,
                  Quand ton illusion n'aurait duré qu'un jour,
                  N'outrage pas ce jour lorsque tu parles d'elle ;
                  Si tu veux être aimé, respecte ton amour.
                  Si l'effort est trop grand pour la faiblesse humaine
                  De pardonner les maux qui nous viennent d'autrui,
                  Épargne-toi du moins le tourment de la haine ;
                  À défaut du pardon, laisse venir l'oubli.
                  Les morts dorment en paix dans le sein de la terre :
                  Ainsi doivent dormir nos sentiments éteints.
                  Ces reliques du coeur ont aussi leur poussière ;
                  Sur leurs restes sacrés ne portons pas les mains.
                  Pourquoi, dans ce récit d'une vive souffrance,
                  Ne veux-tu voir qu'un rêve et qu'un amour trompé ?
                  Est-ce donc sans motif qu'agit la Providence
                  Et crois-tu donc distrait le Dieu qui t'a frappé ?
                  Le coup dont tu te plains t'a préservé peut-être,
                  Enfant ; car c'est par là que ton coeur s'est ouvert.
                  L'homme est un apprenti, la douleur est son maître,
                  Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert.
                  C'est une dure loi, mais une loi suprême,
                  Vieille comme le monde et la fatalité,
                  Qu'il nous faut du malheur recevoir le baptême,
                  Et qu'à ce triste prix tout doit être acheté.
                  Les moissons pour mûrir ont besoin de rosée ;
                  Pour vivre et pour sentir l'homme a besoin des pleurs ;
                  La joie a pour symbole une plante brisée,
                  Humide encor de pluie et couverte de fleurs.
                  Ne te disais-tu pas guéri de ta folie ?
                  N'es-tu pas jeune, heureux, partout le bienvenu ?
                  Et ces plaisirs légers qui font aimer la vie,
                  Si tu n'avais pleuré, quel cas en ferais-tu ?
                  Lorsqu'au déclin du jour, assis sur la bruyère,
                  Avec un vieil ami tu bois en liberté,
                  Dis-moi, d'aussi bon coeur lèverais-tu ton verre,
                  Si tu n'avais senti le prix de la gaîté ?
                  Aimerais-tu les fleurs, les prés et la verdure,
                  Les sonnets de Pétrarque et le chant des oiseaux,
                  Michel-Ange et les arts, Shakspeare et la nature,
                  Si tu n'y retrouvais quelques anciens sanglots ?
                  Comprendrais-tu des cieux l'ineffable harmonie,
                  Le silence des nuits, le murmure des flots,
                  Si quelque part là-bas la fièvre et l'insomnie
                  Ne t'avaient fait songer à l'éternel repos ?
                  N'as-tu pas maintenant une belle maîtresse ?
                  Et, lorsqu'en t'endormant tu lui serres la main,
                  Le lointain souvenir des maux de ta jeunesse
                  Ne rend-il pas plus doux son sourire divin ?
                  N'allez-vous pas aussi vous promener ensemble
                  Au fond des bois fleuris, sur le sable argentin ?
                  Et, dans ce vert palais, le blanc spectre du tremble
                  Ne sait-il plus, le soir, vous montrer le chemin ?
                  Ne vois-tu pas alors, aux rayons de la lune,
                  Plier comme autrefois un beau corps dans tes bras,
                  Et si dans le sentier tu trouvais la Fortune,
                  Derrière elle, en chantant, ne marcherais-tu pas ?
                  De quoi te plains-tu donc ? L'immortelle espérance
                  S'est retrempée en toi sous la main du malheur.
                  Pourquoi veux-tu haïr ta jeune expérience,
                  Et détester un mal qui t'a rendu meilleur ?
                  Ô mon enfant ! plains-la, cette belle infidèle,
                  Qui fit couler jadis les larmes de tes yeux ;
                  Plains-la ! c'est une femme, et Dieu t'a fait, près d'elle,
                  Deviner, en souffrant, le secret des heureux.
                  Sa tâche fut pénible ; elle t'aimait peut-être ;
                  Mais le destin voulait qu'elle brisât ton coeur.
                  Elle savait la vie, et te l'a fait connaître ;
                  Une autre a recueilli le fruit de ta douleur.
                  Plains-la ! son triste amour a passé comme un songe ;
                  Elle a vu ta blessure et n'a pu la fermer.
                  Dans ses larmes, crois-moi, tout n'était pas mensonge.
                  Quand tout l'aurait été, plains-la ! tu sais aimer.


                  LE POÈTE

                  Tu dis vrai : la haine est impie,
                  Et c'est un frisson plein d'horreur
                  Quand cette vipère assoupie
                  Se déroule dans notre coeur.
                  Écoute-moi donc, ô déesse !
                  Et sois témoin de mon serment :
                  Par les yeux bleus de ma maîtresse,
                  Et par l'azur du firmament ;
                  Par cette étincelle brillante
                  Qui de Vénus porte le nom,
                  Et, comme une perle tremblante,
                  Scintille au loin sur l'horizon ;
                  Par la grandeur de la nature,
                  Par la bonté du Créateur,
                  Par la clarté tranquille et pure
                  De l'astre cher au voyageur.
                  Par les herbes de la prairie,
                  Par les forêts, par les prés verts,
                  Par la puissance de la vie,
                  Par la sève de l'univers,
                  Je te bannis de ma mémoire,
                  Reste d'un amour insensé,
                  Mystérieuse et sombre histoire
                  Qui dormiras dans le passé !
                  Et toi qui, jadis, d'une amie
                  Portas la forme et le doux nom,
                  L'instant suprême où je t'oublie
                  Doit être celui du pardon.
                  Pardonnons-nous ; - je romps le charme
                  Qui nous unissait devant Dieu.
                  Avec une dernière larme
                  Reçois un éternel adieu.
                  - Et maintenant, blonde rêveuse,
                  Maintenant, Muse, à nos amours !
                  Dis-moi quelque chanson joyeuse,
                  Comme au premier temps des beaux jours.
                  Déjà la pelouse embaumée
                  Sent les approches du matin ;
                  Viens éveiller ma bien-aimée,
                  Et cueillir les fleurs du jardin.
                  Viens voir la nature immortelle
                  Sortir des voiles du sommeil ;
                  Nous allons renaître avec elle
                  Au premier rayon du soleil !




                  Alfred de Musset






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                    M.H. Nguyen 09.12.2011 22:36:32 (permalink)



                    La Nuit de Décembre




                    LE POÈTE

                    Du temps que j'étais écolier,
                    Je restais un soir à veiller
                    Dans notre salle solitaire.
                    Devant ma table vint s'asseoir
                    Un pauvre enfant vêtu de noir,
                    Qui me ressemblait comme un frère.

                    Son visage était triste et beau :
                    A la lueur de mon flambeau,
                    Dans mon livre ouvert il vint lire.
                    Il pencha son front sur sa main,
                    Et resta jusqu'au lendemain,
                    Pensif, avec un doux sourire.

                    Comme j'allais avoir quinze ans
                    Je marchais un jour, à pas lents,
                    Dans un bois, sur une bruyère.
                    Au pied d'un arbre vint s'asseoir
                    Un jeune homme vêtu de noir,
                    Qui me ressemblait comme un frère.

                    Je lui demandai mon chemin ;
                    Il tenait un luth d'une main,
                    De l'autre un bouquet d'églantine.
                    Il me fit un salut d'ami,
                    Et, se détournant à demi,
                    Me montra du doigt la colline.

                    A l'âge où l'on croit à l'amour,
                    J'étais seul dans ma chambre un jour,
                    Pleurant ma première misère.
                    Au coin de mon feu vint s'asseoir
                    Un étranger vêtu de noir,
                    Qui me ressemblait comme un frère.

                    Il était morne et soucieux ;
                    D'une main il montrait les cieux,
                    Et de l'autre il tenait un glaive.
                    De ma peine il semblait souffrir,
                    Mais il ne poussa qu'un soupir,
                    Et s'évanouit comme un rêve.

                    A l'âge où l'on est libertin,
                    Pour boire un toast en un festin,
                    Un jour je soulevais mon verre.
                    En face de moi vint s'asseoir
                    Un convive vêtu de noir,
                    Qui me ressemblait comme un frère.

                    Il secouait sous son manteau
                    Un haillon de pourpre en lambeau,
                    Sur sa tête un myrte stérile.
                    Son bras maigre cherchait le mien,
                    Et mon verre, en touchant le sien,
                    Se brisa dans ma main débile.

                    Un an après, il était nuit ;
                    J'étais à genoux près du lit
                    Où venait de mourir mon père.
                    Au chevet du lit vint s'asseoir
                    Un orphelin vêtu de noir,
                    Qui me ressemblait comme un frère.

                    Ses yeux étaient noyés de pleurs ;
                    Comme les anges de douleurs,
                    Il était couronné d'épine ;
                    Son luth à terre était gisant,
                    Sa pourpre de couleur de sang,
                    Et son glaive dans sa poitrine.

                    Je m'en suis si bien souvenu,
                    Que je l'ai toujours reconnu
                    A tous les instants de ma vie.
                    C'est une étrange vision,
                    Et cependant, ange ou démon,
                    J'ai vu partout cette ombre amie.

                    Lorsque plus tard, las de souffrir,
                    Pour renaître ou pour en finir,
                    J'ai voulu m'exiler de France ;
                    Lorsqu'impatient de marcher,
                    J'ai voulu partir, et chercher
                    Les vestiges d'une espérance ;

                    A Pise, au pied de l'Apennin ;
                    A Cologne, en face du Rhin ;
                    A Nice, au penchant des vallées ;
                    A Florence, au fond des palais ;
                    A Brigues, dans les vieux chalets ;
                    Au sein des Alpes désolées ;

                    A Gênes, sous les citronniers ;
                    A Vevey, sous les verts pommiers ;
                    Au Havre, devant l'Atlantique ;
                    A Venise, à l'affreux Lido,
                    Où vient sur l'herbe d'un tombeau
                    Mourir la pâle Adriatique ;

                    Partout où, sous ces vastes cieux,
                    J'ai lassé mon coeur et mes yeux,
                    Saignant d'une éternelle plaie ;
                    Partout où le boiteux Ennui,
                    Traînant ma fatigue après lui,
                    M'a promené sur une claie ;

                    Partout où, sans cesse altéré
                    De la soif d'un monde ignoré,
                    J'ai suivi l'ombre de mes songes ;
                    Partout où, sans avoir vécu,
                    J'ai revu ce que j'avais vu,
                    La face humaine et ses mensonges ;

                    Partout où, le long des chemins,
                    J'ai posé mon front dans mes mains,
                    Et sangloté comme une femme ;
                    Partout où j'ai, comme un mouton,
                    Qui laisse sa laine au buisson,
                    Senti se dénuder mon âme ;

                    Partout où j'ai voulu dormir,
                    Partout où j'ai voulu mourir,
                    Partout où j'ai touché la terre,
                    Sur ma route est venu s'asseoir
                    Un malheureux vêtu de noir,
                    Qui me ressemblait comme un frère.

                    Qui donc es-tu, toi que dans cette vie
                    Je vois toujours sur mon chemin ?
                    Je ne puis croire, à ta mélancolie,
                    Que tu sois mon mauvais Destin.
                    Ton doux sourire a trop de patience,
                    Tes larmes ont trop de pitié.
                    En te voyant, j'aime la Providence.
                    Ta douleur même est soeur de ma souffrance ;
                    Elle ressemble à l'Amitié.

                    Qui donc es-tu ? - Tu n'es pas mon bon ange,
                    Jamais tu ne viens m'avertir.
                    Tu vois mes maux (c'est une chose étrange !)
                    Et tu me regardes souffrir.
                    Depuis vingt ans tu marches dans ma voie,
                    Et je ne saurais t'appeler.
                    Qui donc es-tu, si c'est Dieu qui t'envoie ?
                    Tu me souris sans partager ma joie,
                    Tu me plains sans me consoler !

                    Ce soir encor je t'ai vu m'apparaître.
                    C'était par une triste nuit.
                    L'aile des vents battait à ma fenêtre ;
                    J'étais seul, courbé sur mon lit.
                    J'y regardais une place chérie,
                    Tiède encor d'un baiser brûlant ;
                    Et je songeais comme la femme oublie,
                    Et je sentais un lambeau de ma vie
                    Qui se déchirait lentement.

                    Je rassemblais des lettres de la veille,
                    Des cheveux, des débris d'amour.
                    Tout ce passé me criait à l'oreille
                    Ses éternels serments d'un jour.
                    Je contemplais ces reliques sacrées,
                    Qui me faisaient trembler la main :
                    Larmes du coeur par le coeur dévorées,
                    Et que les yeux qui les avaient pleurées
                    Ne reconnaîtront plus demain !

                    J'enveloppais dans un morceau de bure
                    Ces ruines des jours heureux.
                    Je me disais qu'ici-bas ce qui dure,
                    C'est une mèche de cheveux.
                    Comme un plongeur dans une mer profonde,
                    Je me perdais dans tant d'oubli.
                    De tous côtés j'y retournais la sonde,
                    Et je pleurais, seul, loin des yeux du monde,
                    Mon pauvre amour enseveli.

                    J'allais poser le sceau de cire noire
                    Sur ce fragile et cher trésor.
                    J'allais le rendre, et, n'y pouvant pas croire,
                    En pleurant j'en doutais encor.
                    Ah ! faible femme, orgueilleuse insensée,
                    Malgré toi, tu t'en souviendras !
                    Pourquoi, grand Dieu ! mentir à sa pensée ?
                    Pourquoi ces pleurs, cette gorge oppressée,
                    Ces sanglots, si tu n'aimais pas ?

                    Oui, tu languis, tu souffres, et tu pleures ;
                    Mais ta chimère est entre nous.
                    Eh bien ! adieu ! Vous compterez les heures
                    Qui me sépareront de vous.
                    Partez, partez, et dans ce coeur de glace
                    Emportez l'orgueil satisfait.
                    Je sens encor le mien jeune et vivace,
                    Et bien des maux pourront y trouver place
                    Sur le mal que vous m'avez fait.

                    Partez, partez ! la Nature immortelle
                    N'a pas tout voulu vous donner.
                    Ah ! pauvre enfant, qui voulez être belle,
                    Et ne savez pas pardonner !
                    Allez, allez, suivez la destinée ;
                    Qui vous perd n'a pas tout perdu.
                    Jetez au vent notre amour consumée ; -
                    Eternel Dieu ! toi que j'ai tant aimée,
                    Si tu pars, pourquoi m'aimes-tu ?

                    Mais tout à coup j'ai vu dans la nuit sombre
                    Une forme glisser sans bruit.
                    Sur mon rideau j'ai vu passer une ombre ;
                    Elle vient s'asseoir sur mon lit.
                    Qui donc es-tu, morne et pâle visage,
                    Sombre portrait vêtu de noir ?
                    Que me veux-tu, triste oiseau de passage ?
                    Est-ce un vain rêve ? est-ce ma propre image
                    Que j'aperçois dans ce miroir ?

                    Qui donc es-tu, spectre de ma jeunesse,
                    Pèlerin que rien n'a lassé ?
                    Dis-moi pourquoi je te trouve sans cesse
                    Assis dans l'ombre où j'ai passé.
                    Qui donc es-tu, visiteur solitaire,
                    Hôte assidu de mes douleurs ?
                    Qu'as-tu donc fait pour me suivre sur terre ?
                    Qui donc es-tu, qui donc es-tu, mon frère,
                    Qui n'apparais qu'au jour des pleurs ?



                    LA VISION

                    - Ami, notre père est le tien.
                    Je ne suis ni l'ange gardien,
                    Ni le mauvais destin des hommes.
                    Ceux que j'aime, je ne sais pas
                    De quel côté s'en vont leurs pas
                    Sur ce peu de fange où nous sommes.

                    Je ne suis ni dieu ni démon,
                    Et tu m'as nommé par mon nom
                    Quand tu m'as appelé ton frère ;
                    Où tu vas, j'y serai toujours,
                    Jusques au dernier de tes jours,
                    Où j'irai m'asseoir sur ta pierre.

                    Le ciel m'a confié ton coeur.
                    Quand tu seras dans la douleur,
                    Viens à moi sans inquiétude.
                    Je te suivrai sur le chemin ;
                    Mais je ne puis toucher ta main,
                    Ami, je suis la Solitude.






                    Alfred de Musset



                    <bài viết được chỉnh sửa lúc 09.12.2011 22:39:21 bởi M.H. Nguyen >
                    #10
                      Tóc nâu 27.12.2011 00:25:34 (permalink)



                      SONNET


                       
                      Que j’aime le premier frisson d’hiver ! le chaume,
                      Sous le pied du chasseur, refusant de ployer !
                      Quand vient la pie aux champs que le foin vert embaume,
                      Au fond du vieux château s’eveillr le foyer ;
                       
                      C’est le temps de la ville. _ Oh ! Lorque l’an dernier,
                      J’y revins, que je vis encore ce bon Louvre et son dôme,
                      Paris et sa fumée, et tout ce beau royaume
                      (J’entends encore au vent les postillons crier ).
                       
                      Que j’aimais ce temps gris, ces passants, et la Seine
                      Sous ses mille falots assise en souveraine !
                      J’allais revoir l’hiver . – Et toi, ma vie, et toi !
                       
                      Oh ! dans tes longs regards j’allais tremper mon âme ;
                      Je saluais tes murs . – Car, qui m’eût dit, madame,
                      Que votre cœur sitôt avait changé pour moi ?
                       
                       
                      Alfred de Musset
                       
                      Premières poésies







                      <bài viết được chỉnh sửa lúc 27.12.2011 00:27:52 bởi Tóc nâu >
                      #11
                        Tóc nâu 12.02.2012 00:09:23 (permalink)




                        Jamais

                        Jamais, avez-vous dit, tandis qu'autour de nous
                        Résonnait de Schubert la plaintive musique ;
                        Jamais, avez-vous dit, tandis que, malgré vous,
                        Brillait de vos grands yeux l'azur mélancolique.

                        Jamais, répétiez-vous, pâle et d'un air si doux
                        Qu'on eût cru voir sourire une médaille antique.
                        Mais des trésors secrets l'instinct fier et pudique
                        Vous couvrit de rougeur, comme un voile jaloux.

                        Quel mot vous prononcez, marquise, et quel dommage !
                        Hélas ! je ne voyais ni ce charmant visage,
                        Ni ce divin sourire, en vous parlant d'aimer.

                        Vos yeux bleus sont moins doux que votre âme n'est belle.
                        Même en les regardant, je ne regrettais qu'elle,
                        Et de voir dans sa fleur un tel coeur se fermer.


                        Alfred de Musset


                        #12
                          Tóc nâu 12.02.2012 00:14:16 (permalink)




                          Par un mauvais temps


                          Elle a mis, depuis que je l'aime
                          (Bien longtemps, peut-être toujours),
                          Bien des robes, jamais la même ;
                          Palmire a dû compter les jours.

                          Mais, quand vous êtes revenue,
                          Votre bras léger sur le mien,
                          Il faisait, dans cette avenue,
                          Un froid de loup, un temps de chien.

                          Vous m'aimiez un peu, mon bel ange,
                          Et, tandis que vous bavardiez,
                          Dans cette pluie et cette fange
                          Se mouillaient vos chers petits pieds.

                          Songeait-elle, ta jambe fine,
                          Quand tu parlais de nos amours,
                          Qu'elle allait porter sous l'hermine
                          Le satin, l'or et le velours ?

                          Si jamais mon coeur désavoue
                          Ce qu'il sentit en ce moment,
                          Puisse à mon front sauter la boue
                          Où tu marchais si bravement !


                          Alfred de Musset
                          #13
                            Tóc nâu 18.04.2012 22:40:08 (permalink)


                            [image]http://diendan.vnthuquan.net/upfiles/29839/BF774545C62A491DB08313A91568A793.jpg[/image]


                            Une promenade au Jardin des Plantes


                            Sonnet

                            Sous ces arbres chéris, où j'allais à mon tour
                            Pour cueillir, en passant, seul, un brin de verveine,
                            Sous ces arbres charmants où votre fraîche haleine
                            Disputait au printemps tous les parfums du jour ;

                            Des enfants étaient là qui jouaient alentour ;
                            Et moi, pensant à vous, j'allais traînant ma peine ;
                            Et si de mon chagrin vous êtes incertaine
                            Vous ne pouvez pas l'être au moins de mon amour.

                            Mais qui saura jamais le mal qui me tourmente ?
                            Les fleurs des bois, dit-on, jadis ont deviné !
                            Antilope aux yeux noirs, dis, quelle est mon amante ?

                            Ô lion, tu le sais, toi, mon noble enchaîné ;
                            Toi qui m'as vu pâlir lorsque sa main charmante
                            Se baissa doucement sur ton front incliné.



                            A. de Musset







                            <bài viết được chỉnh sửa lúc 18.04.2012 22:42:34 bởi Tóc nâu >
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